Grégory meichtry est un des géants suisse du ski de vitesse. Après de nombreuses années sur les pistes, il prendra sa retraite à la fin de la saison pour se consacrer à ses proches. il revient sur sa carrière et son sport.1. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? J'ai 41 ans. Je viens de Genève en Suisse, marié et papa de jumeaux de 2 ans. Je travaille comme mécanicien de précision dans l’horlogerie et je fais partie de l’équipe suisse de Ski de Vitesse. Nous avons eu la chance, mon frère et moi, d’avoir des parents amoureux de la montagne qui nous ont mis sur les skis tout jeunes et nous ont donné le virus. Je ne les en remercierai jamais assez vu toutes les joies que le ski m’a apporté. 2. Le ski de vitesse est un sport spectaculaire et dangereux, comment vous est venue l’idée d’en faire ? Si le ski de vitesse est en effet très spectaculaire, le danger n’est pas plus important qu’en descente. Les pistes sont tellement larges et bien préparées que lors de chute, les skieurs glissent, mais il y a rarement de choc. Les blessures sont souvent des brûlures et des hématomes mais c’est rarement plus grave. On m’a proposé, en 2006, de venir tester le ski de vitesse à Verbier sur un KL Populaire. Au début, j’ai été impressionné par la piste et par les pilotes. C’est dingue quand tu débarques là-bas avec quelques Super-G et descentes FIS dans les jambes et de voir des hommes et de femmes avec leur tenue aérodynamique et leurs skis de 2m 40 se lancer sur des pentes à plus de 90% et atteindre les 200 km/h. Mais après quelques runs entre 120 et 150 km/h, tu apprends à gérer les accélérations et tu veux juste aller plus vite. Donc tu remontes… 3. Quel a été votre parcours dans ce sport ? Avez-vous, comme beaucoup commencé avec le ski alpin ? En effet, j’ai commencé par l’alpin en compétition jusqu’à l’âge de 20 ans avant de me faire les deux Ligaments Croisés Antérieurs (L.C.A.) sur une course régionale. J’ai ensuite passé mon brevet d’entraîneur et entraîné des jeunes sur Genève. Mais la compétition me manquait, j’ai pu refaire des courses alpines en FIS Citadine puis en Master avant de trouver ma place en Ski de Vitesse. J’ai commencé en Coupe du Monde en 2008 en catégorie SDH (sans matériel aérodynamique, actuelle S2) avec un titre de champion du Monde FIS en 2009 et un en 2013. En 2014, je suis passé en catégorie reine : la S1, j’ai juste fait la tentative de record du monde en SDH, car j’étais passé deux fois tout près du record et que les conditions étaient réunies. C’était gagnant car j’ai battu le record du monde SDH avec 211.020 km/h. En 2017, avec l’arrivée des enfants, c’était trop compliqué pour moi de gérer la famille, les entraînements et la préparation du matériel de S1. Je suis donc revenu en catégorie S2 pour une saison afin de garder le rythme de la compétition sans en avoir toutes les contraintes et j’ai remporté les championnats du Monde et la coupe du Monde. Depuis je skie à nouveau dans la catégorie reine. 4. Vous portez les couleurs suisses, une fierté pour vous ? Je crois que ça se voit à mon casque ainsi qu’à mon surnom « P’tit Suisse » ;-) Sérieusement, oui bien sûr que c’est une fierté de porter les couleurs de son pays même si notre sport n’est pas des plus médiatiques. Et quand, en plus, on a la chance de monter sur un podium et d’entendre l’hymne national c’est toujours un moment poignant. 5. Parlons de votre palmarès maintenant, vous avez été 3 fois champion du monde (2009, 2013 et 2017) et plusieurs fois vainqueurs de la coupe du monde. Que retenez-vous de ces années dorées ? Ce sont des super souvenirs, chaque titre de champion du monde a son histoire et sa saveur. En 2009, j’étais le petit nouveau, c’était une vraie surprise, personne ne me connaissait et surtout après, il fallait confirmer… En 2013, c’est le plus étrange, car je passe à 1 km/h du record du monde donc y avait un mélange de joie et déception. Et en 2017 c’était un peu l’inconnu, ma préparation n’était vraiment pas au top et je ne savais pas si j’arriverais encore à me lâcher complètement avec 2 enfants à la maison. La compétition devient presque secondaire, mais il faut arriver à laisser la famille de côté pour être à 100% sur ses skis pendant la course. J’étais déjà content de prendre le départ et un podium m’aurait contenté, alors le titre ce n’était que du bonheur.
![]() 6. Vous avez dominé la scène helvétique aussi (4 fois champion de Suisse), aujourd’hui vous avez 41 ans, vous souhaitez laisser la place aux plus jeunes ? Bien sûr je n’attends que ça ! J’arrive sur ma dernière saison et j’aimerais bien que la relève soit là. Malheureusement en Suisse, le ski de vitesse n’est pas une discipline très reconnue et on n’a pas de structures comme le Challenge QuikSilver en France qui permettent de faire essayer le ski de vitesse et de trouver des nouveaux athlètes. J’adore partager avec les jeunes qui sont sur le circuit. J’essaie de leur donner quelques conseils avec mon expérience. C’est intéressant, car ils ont une autre vision, une autre approche. C’est important de se remettre en question donc c’est gagnant-gagnant. Il y a vraiment un super esprit chez les juniors et c’est eux qui feront le futur de notre sport donc on se doit de les aider. 7. Voyez-vous votre sport évoluer au fil du temps ? Au niveau sécurité, l’évolution est impressionnante. Les pistes, ainsi que les zones de dégagement, sont beaucoup mieux préparées et sécurisées. Notre matériel aussi a beaucoup progressé avec, entre autre, des casques de sécurité plus performants sous la coque aérodynamique et des nouveaux matériaux pour les dorsales. La préparation des skis aussi, c’est dingue le temps qu’on passe à les entretenir. Par contre niveau de la FIS, à mon avis, ça ne va pas dans le bon sens… Il n’y a que la S1 qui compte. Donc on dénigre la S2 qui est un passage obligé et qui permet de faire ses gammes. On balance des « nouveaux » en S1 dès leur 2ème ou 3ème saison. C’est un peu comme si on vous donnait un guidon de MotoGP en n’ayant fait que quelques courses en Moto3. Pour avoir une pyramide haute, il faut une base large et solide. La S1 c’est le top, ça devrait être l’aboutissement pour un skieur de vitesse, mais le circuit S2 a vraiment son importance afin d’amener les meilleurs dans la catégorie reine. 8. Maintenant, quels sont vos objectifs ? Je n’en ai plus qu’un : le plaisir (rires) ! Cette saison sera ma dernière. Je vais faire quelques manches de Coupe du Monde et les Championnats du Monde. Si j’arrive à être rapide ça sera la cerise sur le gâteau, mais je ne vais pas me mettre trop de pression avec ça. Je ferai mes derniers runs en Andorre début avril sur une piste que j’adore avant de ranger les longs skis pour m’occuper de ma famille. 9. Le ski de vitesse est un sport assez contraignant physiquement, comment arrivez-vous, à plus de 40 ans, à descendre à des vitesses dépassant les 200 km/h ? L’effort est violent mais court, donc encore assez facilement gérable avec l’âge. En règle général, le ski de vitesse est un sport de « vieux ». Dans le top 10 mondial, la moyenne d’âge est bien supérieure à 30 ans. C’est comme en alpin, les bons descendeurs ont de la bouteille. C’est encore plus marqué en ski de vitesse. C’est surtout par choix familial que j’ai décidé de m’arrêter à la fin de la saison. Car l’hiver, entre mon travail, les déplacements pour les entraînements et les courses, c’est beaucoup de temps que je ne consacre pas à ma famille. Le reste de l’année, il y a beaucoup de préparation physique, car même pour des runs d’environ 30 secondes, c’est une grosse charge de travail en allant nager plusieurs fois par semaine et faisant plus de 2500 km de VTT. Ce qui devient plus contraignant c’est d’aller en salle de force. N’ayant jamais été fan de la salle...maintenant je dois vraiment me faire violence pour y aller même si je sais que c’est obligatoire et que si on ne le fait pas on se met en danger sur les skis. 10. Souhaitez-vous ajouter quelque chose pour conclure ? Venez essayer le ski de vitesse, il y a régulièrement des animations ouvertes à toutes et tous dans les stations mais faites-le sur des pistes étudiées pour et sécurisées. Un énorme MERCI à mes proches qui me supportent (dans les 2 sens du terme) tout le long de l’année. Par Hugo Bâcle La section commentaire est fermée.
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